Il m'aborde en anglais, pour me demander l'heure, son accent est parfait. Je lève le nez de mon bouquin et je le dévisage. Il a un large sourire, qui fait saillir ses pommettes. Je cherche ma montre, qui n'est pas à mon poignet, et lui me tend la sienne: "
I just mind if that is correct". Je sors mon portable et je lui confirme qu'il est bien midi moins cinq. "
So it is correct. Thank you so much." Il s'assoit sur le banc près du mien. Il est grand, il a une tête d'acteur hollywoodien, une tête à la Anthony Quinn, celle qu'il a dans Zorba le Grec - il doit avoir le même âge - une tête ravagée par l'alcool. Il s'étire en regardant la cime des arbres, il a les cheveux et des vêtements sales, il a l'air d'un clodo. Il ne semble pas attendre quoi que ce soit. Et à force de le regarder je me perds dans la vision d'un lâcher prise, d'un coup de tête qui fait tout larguer, pour un départ sans destination. Une errance sans quête, juste et vide.
Quelque part sur la route de l'errance, elle est là. "
J'ai ce qu'il faut pour voyager. Assieds-toi sur le sable. Je vais faire quelque chose pour toi, jeune homme un peu perdu. Je vais danser pour mon homme. Après, nous irons dîner. Et après, nous referons l'amour."
Ah...vous "referez l'amour"...Mais alors, tu nous frustres du récit du premier tir si j'ose dire...Dommage, je reste sur ma faim moi.
RépondreSupprimerIl y a des jours où chacun d'entre nous rêve de "départ sans destination" (joli), je crois.
RépondreSupprimerUne forme de liberté face au sentiment d'être pris au piège, de s'être pris au piège tout(e) seul(e). Mais ça passe. Tout passe le bien, comme le mauvais.
Et si elle est là, au bout de l'errance, alors...
Bon le "après nous irons diner" est un peu prosaïque...
J'aime beaucoup cette idée de lâcher prise aussi. Ca me rappelle une nouvelle de David Lodge "l'homme qui ne voulait plus se lever". Même impression. Faire un truc pour...rien mais dont on a toujours eu envie, au fond sans savoir pourquoi.
RépondreSupprimerJ'aime bien cette histoire, comme un conte, c'est pas la première fois que j'ai cette impression chez toi.
Bises de papillon
@ Volcane
RépondreSupprimerPromis je ferai un effort la prochaine fois. :o)
@ celle qui ne poste que de chez elle
non pas au bout de l'errance, simplement quelque part sur la route, parce que si elle est là ce ne saurait être une fin mais un recommencement...
@ VéroPapillon
Pas lu ? ça fait penser à "L'homme qui dort" de Perec, un gars qui un matin décide de ne pas se lever... il n'y aurait pas eu plagiat quand même ??? :o)
Bises au Papillon
Lâcher tout ... ne plus entendre toutes les raisons qui lient ... et foncer vers l'inconnu.
RépondreSupprimerEn être capable un jour ?
@ quine
RépondreSupprimerpeut-être qu'il suffit d'être prêt pour la solitude, quitte à s'apercevoir qu'on ne l'est jamais vraiment
Si... pas trop indiscrète... dans quel livre votre nez se trouvait quand, avec un parfait accent, il vous demanda l'heure?!
RépondreSupprimerRetrouvé depuis?!
Belle nuit, Gaspard!
@ Anna Hyss
RépondreSupprimerVous n'êtes certainement pas indiscrète, ce sont des choses que je partage avec plaisir. Je tente depuis hier de me remémorer le livre. Sans succès. Je jetterai un oeil à ma bibliothèque pour le retrouver. Il n'est pas impossible qu'il s'agisse de L'homme au boulet rouge (J.-P. Manchette).
Merci, Gaspard, pour le partage.
RépondreSupprimerEn lisant vos lignes, ici, en regardant cette image de Zorba - A. Q. , je ne peux pas m'empêcher de penser aux derniers dialogues du film et cette phrase ultime: N'est-ce pas le plus beau désastre?
Et son éclat de rire, puissant, couvrant le bruit des vagues.
Hm... je divague...
@ Anna Hyss
RépondreSupprimerj'ai retrouvé le livre, vous allez être déçue, Jusqu'à quand ? Pour enfinir avec les crises financières de Frédéric Lordon, désolé
"N'est-ce pas le plus beau désastre ?" je ne me souvenais pas, merci pour cela
Non... pas déçue, non.
RépondreSupprimerDonc, pas de raison d'être désolé.
...
Bon week-end!